Paris, Cit¨¦ des Sciences et de l¡¯Industrie, 30 juin 2004

Conf¨¦rence ? Fuite ou circulation des cerveaux ?
Paris, Cit¨¦ des Sciences et de l¡¯Industrie, 30 juin 2004

Je tiens tout d¡¯abord ¨¤ remercier le Pr¨¦sident de la Cit¨¦ des Sciences et de l¡¯Industrie d¡¯avoir pris l¡¯initiative de mettre sur pied cette conf¨¦rence sous le titre ? Fuite ou circulation des cerveaux : de nouveaux enjeux ?.

Cette conf¨¦rence arrive ¨¤ un moment d¨¦terminant de notre r¨¦flexion et de nos travaux en vue de d¨¦velopper une strat¨¦gie int¨¦gr¨¦e et coh¨¦rente permettant de doter l¡¯Union europ¨¦enne des ressources humaines capables d¡¯affronter les enjeux politiques, ¨¦conomiques et technologiques qui se profilent ¨¤ l¡¯horizon.

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Il existe aujourd¡¯hui en Europe une v¨¦ritable prise de conscience politique quant au r?le des ressources humaines dans la mise en ?uvre de l¡¯Espace europ¨¦en de la Recherche, et de la r¨¦ussite des objectifs de Lisbonne et de Barcelone. Et ceci, tant sur le plan quantitatif que qualitatif.

Sur le plan quantitatif, l¡¯Europe souffre d¡¯un retard indiscutable sur ses principaux concurrents. A titre d¡¯exemple, la proportion des chercheurs au sein de la population active est aujourd¡¯hui de 5 pour mille en Europe contre 8 pour mille aux Etats-Unis et 9 pour mille au Japon. Notre objectif est de porter rapidement le chiffre europ¨¦en ¨¤ 8 pour mille, dans le contexte notamment des efforts qui seront consentis pour r¨¦ussir l¡¯objectif ? 3 % ?.

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Sur le plan qualitatif, le constat montre que dans de nombreux pays, les syst¨¨mes en place, qui se r¨¦f¨¨rent parfois ¨¤ des traditions s¨¦culaires, semblent peu propice ¨¤ promouvoir le d¨¦veloppement des carri¨¨res dans la recherche. La structuration des carri¨¨res, surtout au niveau des jeunes chercheurs, ne favorise gu¨¨re l¡¯ind¨¦pendance scientifique. Le cheminement au sein de la carri¨¨re est souvent per?u ¨¤ travers un prisme ¨¦troit qui couvre l¡¯ensemble des ¨¦l¨¦ments qui d¨¦terminent une carri¨¨re dans la recherche, du recrutement ¨¤ l¡¯avancement, en passant par l¡¯¨¦volution des salaires, la gestion des ann¨¦es sabbatiques ou le r¨¦gime des pensions.

Il s¡¯agit de syst¨¨mes o¨´ la mobilit¨¦ physique n¡¯est gu¨¨re encourag¨¦e, et peut m¨ºme parfois encore ¨ºtre consid¨¦r¨¦e comme p¨¦nalisante, en termes notamment d¡¯avancement dans la carri¨¨re ou de portabilit¨¦ des droits en mati¨¨re de pensions ou de s¨¦curit¨¦ sociale.

Cette rigidit¨¦ nuit gravement ¨¦galement ¨¤ l¡¯¨¦mergence de passerelles entre le monde acad¨¦mique et le monde de l¡¯entreprise (ce qu¡¯on d¨¦signe habituellement par la ? mobilit¨¦ intersectorielle ?), qui constitue l¡¯une des grandes faiblesses actuelles du syst¨¨me europ¨¦en.

Le cloisonnement actuel des structures constitue d¨¨s lors l¡¯une des menaces qui p¨¨sent le plus lourdement sur l¡¯attractivit¨¦ de l¡¯Union europ¨¦enne. Le vrai enjeu de l¡¯attractivit¨¦ ¨C et ¨¤ travers elle, de la comp¨¦titivit¨¦ future de l¡¯Union - sera d¨¨s lors notre capacit¨¦ ¨¤ promouvoir des conditions et des perspectives de carri¨¨re qui inciteront les chercheurs ¨¤ venir ou ¨¤ rester travailler en Europe. C¡¯est ce que la Commission a voulu signifier, en lan?ant, en concertation ¨¦troite avec les Etats membres et les acteurs du monde de la recherche, toute une s¨¦rie d¡¯actions concr¨¨tes.

Sur le plan, tout d¡¯abord, du renforcement de la politique de soutien de l¡¯Union ¨¤ la formation, la mobilit¨¦ et le d¨¦veloppement des carri¨¨res des chercheurs, les actions Marie Curie du 6¨¨me programme-cadre de recherche repr¨¦sentent pour la premi¨¨re fois, avec plus de 1,7 milliards d¡¯€, pr¨¨s de 10 % du budget global du programme cadre, soit une augmentation de plus de 70% du montant des aides par rapport au programme-cadre pr¨¦c¨¦dent.

Ces actions sont structur¨¦e autour de trois grands axes: une extension des opportunit¨¦s tout au long de la carri¨¨re des chercheurs ; une ouverture syst¨¦matique des actions aux chercheurs d¡¯autres parties du monde ; une prise en compte, quasi syst¨¦matique elle aussi, des aides au retour.

Ces actions ont connu d¨¨s le premier appel ¨¤ propositions un engouement extraordinaire, avec plus de 4.300 projets d¨¦pos¨¦s pour l¡¯ann¨¦e 2003, d¨¦bouchant sur la signature d¡¯environ 850 contrats, qui repr¨¦sentent eux-m¨ºmes quelque 54.000 personnes-mois d¡¯opportunit¨¦s de financement. Ces donn¨¦es traduisent deux consid¨¦rations fondamentales : d¡¯abord, qu¡¯elles ont ¨¦t¨¦ bien comprises par la communaut¨¦ scientifique ; ensuite, que l¡¯¨¦l¨¦ment de mobilit¨¦ physique qu¡¯elles impliquent participe bien au besoin de libert¨¦ qui caract¨¦rise l¡¯essence m¨ºme du chercheur.

En m¨ºme temps, l¡¯¨¦norme engouement pour les actions Marie Curie ne peut pas occulter un certain sentiment de frustration devant le tr¨¨s grand nombre d¡¯excellents projets qui ne pourront ¨ºtre financ¨¦s. Cette constatation ne peut que renforcer ma d¨¦termination d¡¯en appeler ¨¤ tous les acteurs du monde de la recherche, au niveau communautaire, international et national, pour renforcer de mani¨¨re consid¨¦rable le soutien financier aux activit¨¦s de recherche, et, en particulier, les actions en faveur de la formation, de la mobilit¨¦ et du d¨¦veloppement de carri¨¨re des chercheurs.

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Sur le plan de la mobilit¨¦, ensuite, l¡¯intense travail de coop¨¦ration qui s¡¯est d¨¦velopp¨¦ entre la Commission, les pays membres et les pays associ¨¦s au 6¨¨me programme-cadre a permis la conception et la mise en ?uvre d¡¯une v¨¦ritable strat¨¦gie en mati¨¨re de lev¨¦e des obstacles ¨¤ la mobilit¨¦.

Le portail europ¨¦en sur la mobilit¨¦ des chercheurs, lanc¨¦ en juillet 2003, renvoie aujourd¡¯hui ¨¤ plus de 3.000 sites, et int¨¨gre en permanence des centaines d¡¯offres d¡¯emplois.

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De la m¨ºme mani¨¨re, le r¨¦seau europ¨¦en des centres de mobilit¨¦, qui sera officiellement lanc¨¦ tout ¨¤ l¡¯heure, regroupera 200 centres charg¨¦s de fournir une assistance de proximit¨¦ aux chercheurs et ¨¤ leurs familles dans toute question concernant leur vie dans leur pays d¡¯accueil.

De mani¨¨re plus symbolique encore, la coop¨¦ration qui a ¨¦merg¨¦ entre les services responsables pour la recherche et des affaires int¨¦rieures, au niveau tant national qu¡¯europ¨¦en, a conduit la Commission ¨¤ adopter, en mars 2004, une proposition de directive et deux recommandations destin¨¦es ¨¤ faciliter de mani¨¨re significative l¡¯entr¨¦e des chercheurs non europ¨¦ens au sein de l¡¯Union. Ind¨¦pendamment des effets tangibles que ces actes auront sur la circulation effective des chercheurs en Europe, c¡¯est la philosophie m¨ºme de ces dispositions, qui fait d¨¦pendre l¡¯acc¨¨s des chercheurs ¨¦trangers (et donc leur mobilit¨¦) directement de la qualit¨¦ de leur projet scientifique qui constitue l¡¯attrait majeur de ces propositions.

Enfin, au niveau du troisi¨¨me grand chantier que nous avons mis en place, celui de la valorisation des carri¨¨res, l¡¯ann¨¦e 2004 devrait voir l¡¯adoption de deux recommandations de la Commission portant l¡¯une sur la Charte europ¨¦enne du chercheur, destin¨¦e ¨¤ faciliter la gestion des carri¨¨res dans la recherche, et l¡¯autre sur un Code europ¨¦en pour le recrutement des chercheurs au niveau europ¨¦en.

Beaucoup de ces mesures, il convient de le souligner, touchent ¨¤ des domaines qui rel¨¨vent de la comp¨¦tence des Etats membres.

L¡¯urgence d¡¯aboutir ¨¤ des progr¨¨s tangibles dans ces domaines, li¨¦e ¨¤ la perception des enjeux politiques que repr¨¦sentent les processus de Lisbonne et de Barcelone, a cependant permis que des progr¨¨s significatifs soient r¨¦alis¨¦s, par des contributions volontaires, ¨¤ travers la m¨¦thode ouverte de coop¨¦ration.

Malgr¨¦ l¡¯ampleur de la t?che, et l¡¯urgence des actions ¨¤ mener, la dynamique qui s¡¯est install¨¦e devrait s¡¯¨¦tendre ¨¤ l¡¯avenir. L¡¯Union, nous le savons, devra former rapidement quelque 700.000 chercheurs suppl¨¦mentaires pour remplir les objectifs politiques qu¡¯elle s¡¯est fix¨¦e pour la fin de la d¨¦cennie.

C¡¯est la raison pour laquelle, au sein des Perspectives financi¨¨res esquiss¨¦es pour apr¨¨s 2006,  et en tablant sur une augmentation significative du budget global de la recherche, les futures actions en faveur de la mobilit¨¦ et du d¨¦veloppement de la carri¨¨re des chercheurs devraient ¨¤ nouveau b¨¦n¨¦ficier d¡¯une impulsion importante, structur¨¦e autour d¡¯un certain nombre d¡¯axes-cl¨¦s, telles que la formation initiale des chercheurs (par un soutien plus r¨¦solu ¨¤ la structuration des formations, notamment transnationales et transdisciplinaires) ; le transfert des connaissances et des technologies ; la mobilit¨¦ intersectorielle ; et la formation tout au long de la vie.

De la m¨ºme mani¨¨re, le renforcement des ressources humaines de la recherche constituent l¡¯une des six actions prioritaires des Orientations pour la politique de soutien ¨¤ la recherche de l¡¯Europe, que la Commission a adopt¨¦ le 16 juin dernier.

L¡¯ensemble des actions qui ont ¨¦t¨¦ d¨¦crites ci-dessus font partie d¨¨s lors d¡¯un continuum qui vise ¨¤ offrir ¨¤ l¡¯ensemble de ces actions un v¨¦ritable encadrement strat¨¦gique. C¡¯est ainsi, par exemple, que les r¨¦flexions de ce jour sur les carri¨¨res, et notamment les perspectives d¡¯aboutir rapidement au lancement de la Charte et du Code de conduite dont il a ¨¦t¨¦ question plus haut, seront poursuivies et amplifi¨¦es au cours d¡¯une conf¨¦rence organis¨¦e par la Pr¨¦sidence n¨¦erlandaise de l¡¯Union, les 29 et 30 septembre prochains ¨¤ La Haye, sur le th¨¨me : ? Circulation des cerveaux : les instruments ?.

Enfin, et afin d¡¯accr¨¦diter davantage encore le r?le d¨¦terminant des chercheurs dans l¡¯¨¦volution de la soci¨¦t¨¦, j¡¯ai le plaisir d¡¯annoncer que la Commission lancera, en 2005, une vaste action de sensibilisation grand public intitul¨¦e ? Chercheurs en Europe ?.

Toutes ces actions, qui contribuent ¨¤ forger, au niveau europ¨¦en, ¨¤ travers des perspectives de carri¨¨re fond¨¦es sur une meilleure prise en compte des diff¨¦rentes formes de mobilit¨¦, se rejoignent en fin de compte autour d¡¯un m¨ºme enjeu central, difficile mais d¨¦terminant pour le futur de la comp¨¦titivit¨¦ europ¨¦enne : celui de cr¨¦er un v¨¦ritable march¨¦ du travail pour les chercheurs au niveau europ¨¦en.

C¡¯est son av¨¨nement qui d¨¦terminera, ¨¤ terme, la v¨¦ritable valorisation de la profession du chercheur en Europe, et, ¨¤ travers lui, les nouveaux espaces de la libert¨¦ scientifique en Europe.

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Je vous remercie de votre attention.

Item source: Date: 30/06/2004